L’ex-chef de la Première Nation des Pekuakamiulnuatsh qui a initié le recours, Clifford Moar, l’avocat spécialisé de Cain Lamarre, Me Benoît Amyot, le chef actuel Gilbert Dominique, le directeur intérim de la Sécurité publique de Mashteuiatsh, Jonathan Duchesne et le vice-chef aux relations avec les Premières Nations, les gouvernements et la région et responsable du dossier de la Sécurité publique, Jonathan Gill-Verreault.

Le 27 novembre dernier, la Cour suprême du Canada rendait publique sa décision concernant le dossier du sous-financement de la Sécurité publique de Mashteuiatsh. Dans une décision presque unanime, elle a rejeté l’appel du Québec et a confirmé la décision de la Cour d’appel d’ordonner le paiement du déficit accumulé de 767 745,58 $ avec intérêts.

Le jugement était très attendu. C’est avec grande fierté que la décision de la Cour suprême du Canada a été accueillie par les représentants de la Première Nation des Pekuakamiulnuatsh qui en ont fait l’annonce au cour d’une conférence de presse qui s’est tenue au pavillon du site Uashassihtsh de Mashteuiatsh. C’est le chef Gilbert Dominique qui en a fait l’annonce, en compagnie de Me Benoît Amyot de Cain Lamarre, qui a lui-même présenté la cause à la Cour suprême du Canada en avril dernier. Le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, M. Ghislain Picard, s’est également joint à la présentation, mentionnant qu’il se réjouissait de cette décision.

Dans les faits, la Cour suprême du Canada fait état que le refus obstiné du Québec de renégocier véritablement les conditions financières de l’entente de financement de la Sécurité publique constitue non seulement une atteinte aux exigences de la bonne foi, mais aussi un manquement à l’obligation d’agir conformément à l’honneur de la Couronne. Elle souligne que ces ententes visent à faire avancer la réconciliation par l’établissement et le maintien d’un corps de police autochtone offrant des services culturellement adaptés et de qualité comparable à ceux des corps de police environnants. Bien que la Cour suprême ne se soit pas prononcée sur l’existence du droit à l’autonomie gouvernementale en matière de sécurité publique, elle reconnaît l’existence d’une revendication crédible à ce sujet de la part de la Première Nation des Pekuakamiulnuatsh.

« La décision de la Cour suprême du Canada aura une incidence directe sur la pérennité de notre poste de police, mais également sur la sécurité de toutes les Premières Nations du pays. Nous sommes fiers d’être allés jusqu’au bout dans ce dossier, en déployant tous les efforts afin d’obtenir un financement adéquat, prévisible et stable pour la Sécurité publique de Mashteuiatsh », a mentionné le chef de la Première Nation des Pekuakamiulnuatsh, Gilbert Dominique.

Pour la Première Nation des Pekuakamiulnuatsh et toujours selon les propos du chef Dominique, cette bataille en était une de principe « car nous étions convaincus que notre Première Nation faisait face à une injustice flagrante et à une attitude tout à fait déshonorante de la part des gouvernements dans la négociation pour le renouvellement, année après année, de notre entente de financement, pour assurer la sécurité publique dans notre communauté. C’est une victoire pour les membres de notre Première Nation, mais également pour la sécurité de toutes les Premières Nations à travers le pays ».

Rappel des faits

En 2017, Pekuakamiulnuatsh Takuhikan a déposé une poursuite devant la Cour supérieure du Québec afin de récupérer le déficit accumulé de 1,6 million $ de la Sécurité publique de Mashteuiatsh causé par le sous-financement des gouvernements du Québec et du Canada. Après avoir reçu une décision défavorable, Mashteuiatsh a porté le dossier en appel.

La Cour d’appel du Québec a rendu un jugement unanime en décembre 2022 en faveur de Pekuakamiulnuatsh Takuhikan et a condamné les gouvernements fédéral et provincial à lui rembourser 1,6 million $. Elle a conclu que les gouvernements du Québec et du Canada agissent de façon indigne, déshonorable et abusive en matière de financement des services policiers autochtones et nient la réalité pourtant largement documentée, notamment par la Commission Viens.

Le Canada a payé sa condamnation au printemps 2023 et n’a pas porté en appel la décision de la Cour d’appel du Québec. Pour sa part, le Procureur général du Québec a déposé une demande d’autorisation d’appel afin de porter l’affaire devant le plus haut tribunal du pays.

La cause a été entendue devant la Cour suprême du Canada les 23 et 24 avril 2024 à Ottawa.

« C’est un jugement qui est dur envers le gouvernement du Québec. L’attitude abusive du gouvernement du Québec dans la négociation de notre entente n’est assurément pas conforme à l’honneur de la Couronne. Cette façon de faire relève de l’abus de droit qui est totalement contraire à l’ordre et à leur obligation d’agir honorablement. Mes collègues et moi sommes heureux qu’un des dossiers reflétant le racisme systémique au pays et dans la province de Québec soit enfin régularisé. Il faut que le gouvernement du Québec tienne compte dans l’avenir, des enseignements que ce jugement leur impose dans plusieurs autres dossiers. Il doit prendre acte de la décision sans équivoque de la Cour suprême. Il doit aussi apporter sur le champ les correctifs qui s’imposent afin de négocier de façon honorable avec les Premières Nations. Dans un autre dossier qui nous concerne plus particulièrement et qui est aussi important, le Québec doit notamment changer sa façon de faire à notre négociation territoriale globale visant à convenir d’un traité », a ajouté le chef Dominique.