Puekuakami, ut nashipetimit nete meniss ashini / Le Pekuakami, du canot sur la rive au rempart de roches, tel est le nom de la nouvelle exposition temporaire présentée au musée amérindien de Mashteuiatsh et ce, jusqu’au 16 avril 2022. Le vernissage de cette exposition a eu lieu le 20 novembre dernier en présence des artistes et de nombreux invités et diffusé en direct sur Facebook. L’exposition met en valeur l’importance de la relation que les Pekuakamiulnuatsh entretiennent avec le Pekuakami.
La commissaire en charge de cette exposition, Mme Katia Kurtness, a souhaité réunir des œuvres d’artistes de la communauté autour d’une présentation plus informative issue de témoignages, de recherches et d’observations documentant la modification de cette relation au fil des années et les conséquences qui en découlent. Parmi ces artistes, nous retrouvons Eruoma Awashish, Sarah Cleary, Amélie Courtois, James Dominique, Marie-Andrée Gill, Michel Jean, Tania Jourdain, Manuel Kak’wa Kurtness, Martin Duchesne-Kurtness, Katia Kurtness, Patricia Langevin, Raphaëlle Langevin, Elizabeth Raphaël, Florent Robertson, Thomas Siméon et Harry Wylde, de même qu’une participation spéciale des étudiants de l’école Kassinu Mamu de Mashteuiatsh accompagnés par leur enseignante en art Mme Josée Robertson.
Toujours dans le cadre de cette exposition, l’écrivain, chef d’antenne et journaliste, Michel Jean, a fait une brève apparition par visioconférence (il ne pouvait être présent) et a fait une lecture d’extraits de son roman Kukum. « J’ai toujours été impressionné par les couleurs du Pekuakami. Ce n’est pas un lac, c’est une mer au milieu des arbres; c’est une mer au milieu de la forêt boréale. Le Pekuakami a pris beaucoup de place dans ma vie, et beaucoup de place dans mes œuvres. Dans mon roman, c’est mon arrière-grand-mère Amanda qui parle ainsi : Je me concentre sur le lac devant moi, ses vagues qui mordent le sable et viennent mourir en se jetant à nos pieds. Ce matin, le vent porte sa brume et mouille ma peau. Ainsi nous ne faisons qu’un : Pekuakami, le ciel et moi. J’ai vécu près d’un siècle à ses côtés; j’en connais chaque baie et toutes les rivières qui s’y jettent et s’en déversent… Pourtant c’est le seul lac du Nitassinan qu’un regard ne peut traverser. Comme l’océan, il faut en imaginer l’autre rive. J’y arrive encore. Quand je ferme les paupières apparait celui que les anciens appelaient Pelipaukau, la rivière où le sable se déplace. »
Pour sa part, madame Lise Gill, co-autrice d’un mémoire portant sur la préservation des berges, s’est adressée en personne aux personnes présentes, tirant les grandes lignes du mémoire qu’elle a préparé avec son conjoint, M. Roger Tremblay, et qui fut initialement présenté au BAPE en 2017, dans le cadre de l’étude d’impacts sur l’environnement du programme de stabilisation des berges du lac Saint-Jean. Le mémoire a pour titre « Une responsabilité collective, la protection du Shakahikan » qui fait partie intégrante de l’exposition. Invitée à prendre la parole, Lise Gill a fait lecture de quelques extraits du mémoire et s’est présentée de la façon suivante, exprimant son attachement à la Nation : « Je suis une Pekuakamiushkuau; je suis née au bord du Pekuakami et il demeurera toujours mon chez-nous. Je suis aussi d’une réserve et d’un réservoir; deux traces profondes des politiques coloniales… Je suis du pays de ceux et celles qui naviguaient pour venir à la rencontre des nôtres, du nord au sud, de l’est et de l’ouest. Je n’ai pas eu à choisir le Pekuakami; je l’ai dans la peau. Il a contribué à faire de moi ce que je suis. Mes meilleurs souvenirs sont ici à Mashteuiatsh, comme la présence d’un canot près de chaque tente ou maison de la pointe bleue. Les MM Verreault, Robertson, Nacouti, Natipi qui descendaient au bord de l’eau, le canot sur le dos pour pêcher ou pour une promenade. De ceux qui transportaient de l’eau avec un joug de bois et des sceaux, du lac vers leurs tentes ou maisons, été comme hiver. J’ai vu des dorés aussi grands que mes frères et de très grosses ouananiches. Je n’ai pas connu le retour des familles du territoire en canots, mais maman m’a raconté. L’accès direct des maisons et des tentes au lac, faisait partie de nos vies. Je me souviens des fameuses bosses de canot. Nos papas en avaient tous… ». Le mémoire en question peut être consulté sur place, dans la salle d’exposition temporaire.
Outre l’exposition permanente offerte aux visiteurs du musée amérindien, Puekuakami, ut nashipetimit nete meniss ashini / Le Pekuakami, du canot sur la rive au rempart de roches est très certainement l’une des expositions les plus révélatrices de notre lien avec le Pekuakami. Avec les nombreux artistes qui y ont apporté leur contribution par la présentation de plusieurs œuvres, elle devient très représentative des gens du milieu et des artistes et artisans qui se plaisent encore de nos jours à exprimer leur fierté sous diverses formes. Et que dire de la participation des élèves de l’école Kassinu Mamu; ils ont répondu à une question sur le Pekuakami, et ils en ont donné leur appréciation à travers des dessins démontrant leur affection pour le lac, mais aussi leurs préoccupations. Bref, une exposition à voir sans faute jusqu’au 16 avril prochain.