Étiennette Benjamin et Maurice Germain ont célébré leur 50e anniversaire de mariage le 24 juin dernier à l’église de Mashteuiatsh. Ils se sont mariés le 5 janvier 1973 à l’église de la paroisse St-Charles-Borromée de Pointe-Bleue, comme elle était appelée à l’époque. Rencontrés sur le site Uashassihtsh de Mashteuiatsh lors du Grand rassemblement des Premières Nations le 9 juillet dernier, le couple Benjamin-Germain a accepté de nous révéler le secret de leur longévité en tant que couple mais surtout, l’histoire de leur union, de leur amour.

La surprise du soulignement de ce précieux anniversaire avait été concocté par leur fille Martine et leur petite-fille Marie-Pascale, qui n’ont pas ménagé leurs efforts pour en faire un succès. Pour elles, le 50e anniversaire de leurs parents étaient un incontournable qu’il fallait célébrer.

« On s’est connu en dessous d’un sapin », lance à la blague Maurice Germain. En réalité, il s’est intéressé à Étiennette en la voyant dans la salle de billard de M. Eugène Paul, au centre du village quelque part en 1970. Il était accompagné de ses amis Aram Jourdain, Richard Raphaël et Léon Siméon entre autres. « Je l’ai vue et je me suis tout de suite intéressé à elle. Je ne l’ai pas abordé tout de suite, je n’ai fait que la regarder sans rien dire, mais mon idée était faite. »

Étiennette pour sa part, était toujours avec ses amies Jeanne d’Arc Dominique, Madeleine Jourdain, et Yvonne Siméon lorsqu’elles allaient à la salle de billard. À l’époque, c’était probablement l’un des seuls lieux publics où de telles rencontres étaient possibles. Tout le reste se passait en territoire ou lors de cérémonies. « Je suis montée dans le bois avec ma tante Philomène Benjamin et mon oncle Dominique St-Onge; c’est là que je l’ai vu et que j’ai appris qu’il me regardait tout le temps (rires). On a sorti ensemble un an avant de nous installer ensemble l’année suivante. Puis en janvier 1973, c’était le mariage ».

« Dans les faits, j’ai rencontré Étiennette au lac Alec (situé sur la route des Passes dangereuses le long de la rivière Péribonka). J’étais chum avec Jacques Raphaël et Étiennette était dans ce secteur. Le lac Alec était au 29e mille et moi j’étais basé au 45e mille. Je suis descendu voir mon chum Jacques et c’est là que notre union a réellement pris forme », raconte Maurice sous l’approbation d’Étiennette.

50 ans après, ils sont toujours ensemble. Le secret de leur longévité, c’est Étiennette qui présente la version du couple. « Ce n’est pas compliqué, il suffit de se parler. Aujourd’hui, dès qu’il y a un conflit dans un couple, aussi petit ou aussi grand soit-il, la séparation devient la solution. Pour nous, il était important de s’asseoir et de discuter pour ne pas laisser trainer un problème. Par conséquent, le problème étant réglé, nous n’avions qu’à continuer notre vie de tous les jours.»

Et la forêt dans tout ça, était et demeure le lieu de ressourcement. Bien souvent, ils sont allés à la chasse ensemble ou séparément avec leurs familles, mais le seul fait de se retrouver en territoire était inspirant. « Vivre en territoire a quelque chose qui nous unit davantage » ajoute Maurice en esquissant un léger sourire.

Encore aujourd’hui, c’est encore possible d’aller se ressourcer et les jeunes et les moins jeunes couples auraient intérêt à aller dans le bois, selon Étiennette et Maurice. « En forêt, il n’y a rien qui nous dérange, il n’y a rien qui nous sépare » (faisant allusion à la technologie, aux tablettes et téléphones). « C’est une véritable communion avec la nature où les liens sont plus forts. »

Chacun avait ses occupations en territoire. Pour elle, c’était la broderie et le perlage alors que pour lui, c’était le travail du bouleau comme par exemple, la préparation des fûts de raquettes. Là où ils se retrouvaient véritablement, c’était lors des déplacements en canot sur les lacs ou sur les rivières..

Quelques années plus tard, pour habiter ensemble en territoire, Maurice Germain avait été invité par le couple Marie-Louise et Pierre Manigouche qui possédaient un terrain de chasse un peu plus haut. Après le décès de ce dernier en 1977, Madame Marie-Louise cherchait un couple qui ne consommait pas afin de prendre soin du territoire de chasse. C’est ainsi que Maurice et Étiennette ont été approchés et se sont installés finalement dans cette partie de territoire où ils ont passé plusieurs années. « On a commencé par un carré de tente et l’automne venu, il devenait évident qu’il fallait construire un camp. Dans les faits, j’en ai construit deux, à la demande de Madame Marie-Louise qui occupait encore ce territoire » précise Maurice Germain. Encore de nos jours, ils s’y retrouvent toujours avec le même plaisir.

De l’union d’Étiennette Benjamin et de Maurice Germain, sont nés cinq enfants : Martine, Jean-François, Maurice Junior, Marie-Jeanne (du nom de la mère d’Étiennette) et Kathia (cette dernière est décédée en 2008 à l’âge de 29 ans). Ils sont évidemment grands-parents depuis un bon nombre d’années et toute leur richesse repose sur une présence régulière en territoire, une vie d’implication dans la communauté, deux familles imprégnées par les valeurs traditionnelles avec pour base, le nehlueun (notre langue). Longue vie et beaucoup de bonheur au couple Benjamin-Germain!